La crise du dialogue politique

L'absence de débat démocratique constitue la pire situation antidémocratique, celle de la non contradiction. La démocratie pourrait se résumer à l'échange contradictoire, entre le pouvoir et l'opposition, et entre acteurs politiques et citoyens de bonne volonté.

La réduction des discours partisans à des éléments de langage, donnés souvent sous forme de slogans et de discours incendiaires, infantilise le peuple, avant de l'irriter bientôt, le conduisant à reconnaître ce type de rapport comme une forme de mépris, sous des dehors démocratiques, qui risque d'apparaître comme un mauvais jeu. Le peuple a besoin du respect de l'élite qui prétend ne vouloir que son bien, envers et contre tout.

Si le peuple croupit dans un état d'assoupissement et de léthargie coupable, l'élite s'embourbe, pour sa part, dans l'ivresse et l'euphorie qui ont aussi leurs sombres revers. Les questions qui surgissent, dès lors, nous condamnent à une réflexion, en profondeur, sur la possibilité de faire émerger de nouveaux rapports. Dans ce contexte-là, en effet, vaut-il vraiment la peine de mettre un outil aussi précieux que la démocratie entre les mains d'individus qui ne demandent qu'un jouet et des injonctions ? Faut-il transgresser "les règles du jeu" au nom de la paix, avec le risque de perdre la face et de "payer cash" le prix de l'assouplissement ? Chacun y répondra, évidemment, selon ses intérêts et la cohérence de son jeu politique.

Au demeurant, toute attitude interprétée, ou ressentie par le peuple, comme une forme arrogante et subtile de mépris, d'une part, ou de faiblesse d'autre part ouvrira les portes de la mésalliance avec les uns ou avec les autres. Mais il y a une issue, c'est la reprise du dialogue entre des élites publiques engagées, tout le monde le voit, dans un combat haineux et fratricide qui risque de se terminer dramatiquement. Il faut que la raison et les principes républicains prévalent sur les mobiles nombrilistes et enrobés de passions.

Pr. Birahim Thioune .