Comment vaincre Kouss kondrong (le lutin pourvoyeur de richesses) ?
Cher Monsieur de la Fontaine, le conte de la brousse et de la forêt reprend son train, après les violents et douloureux événements qui ont secoué la République de Zanaga. Je vous le dis, le lutin détenteur de toutes sortes de richesses prend aujourd'hui le visage des machines. La richesse ne passe plus par la victoire sur un être surnaturel qu'il faut aller vaincre au détour d'un chemin de forêt. C'est aujourd'hui une question de "flux contrôlés" par des gens qui sont derrière ce qu'on appelle des ordinateurs. Cela rend évidemment difficile l'exercice du pouvoir à cause de toutes formes de pressions des marchés financiers. Les politiques n'ont pas le pouvoir absolu dans ce domaine.
En tout cas, la République garde patience, en attente de l'arrivée des pluies précoces et qu'on annonce abondantes, avec des espoirs de régénération de nos campagnes asséchées par le dérèglement climatique. D'ailleurs, le discours dominant questionne dans l'angoisse l'avenir de notre environnement menacé par la crise climatique. On parle énormément d'effet de serre, d'empreinte carbonne, d'énergie verte, de transition écologique, associant les questions climatiques et celles de la dégradation des écosystèmes environnementaux. Il y a aujourd'hui comme une sorte de culte et de réveil d'une grande sensibilité pour la nature.
Ce qui est terrifiant, en rapport avec ces phénomènes sus-évoqués, cher Maître des Eaux et Forêts, c'est l'errance d'une certaine jeunesse sans travail à travers les forêts, les océans et les déserts, pour espérer atteindre l'Eur-Hope et l'Ham-Rique qu'elle sublime en pays de Cocagne. La solution est, semble-t-il, la mise en œuvre de l'"équité sociale" dans des domaines variés de notre vie communautaire (santé, école et sécurité).
Qui sont les candidats ?
1- Les pêcheurs/convoyeurs
Les hommes de la mer deviennent des rentiers de voyages clandestins.
Les raisons invoquées :
- La mer "se vide" du fait de l'activité de bateaux de pêche dans les eaux territoriales du Zanaga.
- Les jeunes se détourneraient des activités de pêche, à cause de la scolarisation, principalement.
2- Des jeunes en âge de responsabilité et sans ressources substantielles
Cette frange de la jeunesse donne comme raisons :
- la honte de ne pouvoir assumer leurs propres charges sociales
- le désir légitime de se distinguer dans la compétition sociale, en allant cueillir, dans les pays nantis, des ressources pour monter en prestige.
Le plus urgent c'est de penser une nouvelle gouvernance de la migration, à partir de modèles propres et endogènes, en tenant compte tout à la fois de nos richesses, du sol et du sous-sol, de notre potentiel halieutique et de l'énergie solaire.
Changer le narratif
En tous les cas, il faut commencer par changer le narratif, en cessant de stigmatiser les partants pour de lointains horizons comme le Ven Ven-Zuel ou le Braisé, ces migrants ou réfugiés décrits comme des hordes, des fugitifs, etc.
Le mythe de l'invasion migratoire dévastatrice, une sorte d'infestation, par des nuages de sauterelles doit être combattu et remplacé par la conception universaliste d'une nécessaire migration au sein des continents. Dans cette perspective, on cherchera à faire l'inventaire des avantages du mouvement migratoire au sein de l'espace africain.
Cher Maître des Eaux et Forêts, comme vous le voyez, la nature et ses potentialités -que vous essayiez de protéger - demeurent au cœur des problématiques actuelles de développement, un peu partout dans notre monde actuel.
Professeur Birahim Thioune